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Libération
Critique

Rebecca.

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Arte. 0 h 35.
publié le 25 février 2002 à 22h23

L'amour charnel, ce n'est pas pour Hitchcock. L'aspiration par laquelle le corps est sommé de jouir, l'amour en tant qu'il côtoie la mort, ce n'est pas pour lui. Ce qui l'intéresse, lui qui ne s'est plus mélangé avec une femme, même la sienne, une fois son mariage consommé, c'est l'amour auquel on rêve. Pas de gestes déplacés, pas de pelotage obscène, sauf hors champ, dans ses vieux jours, quand le vieux maître pète les plombs et exige de Tippi Hedren qu'elle se prête à certains jeux sexuels avec lui. Pas d'effraction charnelle, rien de ce qui produit la jouissance ordinaire des gens ordinaires. Quand l'amour n'est pas ordinaire, il faut qu'il soit extraordinaire. Cet amour-là passe par le corps des femmes. Quand on n'aime pas à mort, dans le lit de la nuit, on en arrive à tuer. On y pense, on y rêve.

Rebecca parle d'amour et de meurtre. Pas étonnant que la société des admirateurs d'Hitchcock n'y pige rien. Après Rebecca, première variation hollywoodienne sur un fantasme de meurtre, Hitchcock ne cessera de broder (jusqu'à l'apothéose de Marnie) sur ce canevas de femme frigide obsédée à l'idée qu'on veut la tuer. On ne peut pas ne pas voir, dans cette tentative d'effraction inaugurale, la peur et la jouissance de Joan Fontaine à l'idée que sa belle-mère symbolique, la terrifiante Judith Anderson, veut la rendre folle. Qu'est-ce qui la fait mouiller sa culotte, le meurtre par suicide, préparé au château où sont censées se consommer ses amours avec Laurence Olivier, ou le meurtr