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Libération

Le balafré

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publié le 20 mars 2002 à 22h39

Sur le gâteau de fiançailles, il est marqué Raphaël. Dans la salle, musique de bal, un synthé et du Adamo. Raphaël n'a pas 25 balais. Il n'a que des cicatrices. Du body-art de rue, presque. A l'oreille, à la gorge, à la tempe, la droite, la gauche, aux joues, à la main gauche (deux). Il les égrène comme d'autres alignent les stats sur l'insécurité. Un peu fiérots, un peu à leur affaire. «Celle-là, je l'ai dite. Celle-là, je l'ai dite. Celle-ci, je l'ai dite. Celle-là, je l'ai dite. Et puis, celle-ci. Et puis, celle-là.» Enfant, son film fétiche, c'était Scarface. Le truc avec Al Pacino, le mythe total, «say hello to my little friends» et compagnie. Bang, bang, trois tirs et douze cadavres. Raphaël avait 12 ans. Il l'a vu trente fois depuis. Seulement, lui, ce n'est pas Miami, c'est le Blitz ou le Cosmos à Ostende. Les bastons avec les touristes. «Je suis tombé dans les pommes. Mon copain m'a ramené au camping.» Chez lui, les armes automatiques sont ménagères. Il y a la hache. «"Je vais te tuer", j'ai fait à mon frère. J'ai couru vers la porte. J'ai lancé la hache. Il a regardé. Schroufff. La hache s'est plantée sur la porte.» Il y a la raquette. «Je tournais autour de la table, comme ça ma mère, elle pouvait pas m'attraper. Elle prend la raquette. Elle donne un coup. Schroufff. J'évite. Je recommence à jouer. Et elle me l'éclate sur la tête.» Il y a l'écouvillon, «le truc pour nettoyer les biberons, avec des poils en plastique: elle me l'a lancé. Schroufff. Il est resté plan