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Libération
Critique

La Forêt interdite

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TCM, 19 h 10
publié le 10 juillet 2002 à 0h21

Sensualisme. Loin des références historiques (Diderot, Fragonard), le mot semble avoir été inventé pour Nicholas Ray, et surtout pour sa Forêt interdite, ode sensuelle à la terre et ses habitants : les hommes, les femmes, les serpents. Sans oublier les petits oiseaux de toutes les couleurs, ceux que chantait Bécaud, grand sensualiste lui-même. Avec Ray, on peut même parler de panthéisme, le cinéaste s'échinant, comme son homonyme indien, Satyajit Ray, à faire surgir des dieux au détour de chaque plan ­ des dieux-arbres, des dieux-plantes, des dieux-oiseaux, autant de bonnes nouvelles arborescentes au fin fond des bayous. La Forêt interdite (1958) est le film fondateur de l'écologie lyrique, une fresque amoureuse dans laquelle se mêlent un corps d'homme et un corps de femme, Adam et Eve des marais de Louisiane, dans une vision baroque et infernale du paradis perdu. Du paradis en train de se perdre, plutôt.

Christopher Plummer, professeur de sciences naturelles illuminé, se fait garde-chasse pour préserver les derniers oiseaux des Everglades, dont les plumes exotiques ornent les chapeaux des belles de Miami. Une jolie fille un peu sauvage (Chana Eden) se donne à lui dans une jungle d'effets romantiques, avec une fureur qui rappelle Hot Blood, autre chef-d'oeuvre rastaquouère de l'éternel teenager du cinéma américain.

Ray fut viré du tournage par le producteur-scénariste Budd Schulberg, qui trouvait qu'il perdait trop de temps à choisir ses angles de caméra et à diriger ses acteu