L'homme a la crinière des conquérants, le regard aussi. Pénétrant et pas seulement. Dans cet oeil bleu qui se pose franchement sur son interlocuteur, il est aisé de lire la pudique passion qui anime Robert Paxton, états-unien, professeur d'histoire hier encore à Columbia, parfait francophone. Acceptant de répondre en quatre fois une petite heure aux questions de l'impeccable Marc Riglet, prenant son temps. Paxton évoque sa Virginie natale du temps de la ségrégation, cette «mama» noire qui fut comme une seconde mère pour lui, l'absence de questionnement, jusqu'à ce que ses parents le hissent vers le Nord-Est. Au Sud, grossièrement, on dira : le corps parlait. Au Nord, c'est l'esprit. Et de l'esprit, Robert O. Paxton en a plus qu'un autre. Voilà donc le Virginien pure souche prenant fait et cause pour les Noirs américains, contre la guerre du Viêt-nam.
Plus surprenant, il débarque à Paris pour achever une thèse sur l'armée de l'Armistice et découvre quelques archives allemandes microfilmées par les Alliés. Cette matière brute, taillée, éprouvée, polie, va servir de base au livre qui tombe comme une bombe en 1973, la France de Vichy (éditions du Seuil). Il y écrit, sans se départir de son calme, que ce que l'on a bien voulu nous faire croire est faux : le gouvernement de Pétain a bel et bien devancé les désirs de l'occupant allemand. Le réquisitoire est implacable, historiquement, éthiquement. Et c'en est fini d'une certaine légende franco-française, le don de sa personne à la F