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Libération
Critique

Le Triangle de feu

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Ciné Cinéma Classic, 19 h 35.
publié le 25 octobre 2002 à 1h32

1932. Le cinéma commence et finit cette année-là. Quelque chose finit, en tout cas. Quelque chose de compact, de strident. On en parlait il y a deux jours en évoquant deux merveilleux films de 1932, la Nuit du carrefour et la Tête d'un homme. Deux ans plus tard, c'est Toni. Encore plus beau, encore plus éblouissant. Mais c'est en même temps définitivement moins bien. Dans cette néoréalisation précoce du monde, Renoir invente le fantastique amoureux, mais il perd en même temps ce qu'il appréhendait, presque sans y penser, dans la Nuit du carrefour, cette fulgurance inédite, cette sensation de perte et d'ellipse, ce tragique social auquel il ne se risquera pas une seconde fois, pas plus que Duvivier ne se brûlera de nouveau au pathétique abstrait, ramassé sur lui-même, presque un sentiment éteint, de la Tête d'un homme.

Cette semaine, grâce à la patience fouineuse de Bruno Deloye, c'est au tour d'une merveille rarissime de cette même année 1932, le Triangle de feu, d'éblouir ceux qui n'ont pas troqué l'amour du cinéma pour une panoplie narcissique de petit hom(m)e cinéma. Le cinéma vivant, 1932 ou 2002, n'existe qu'en tant qu'il s'envisage possible.

­ C'est quoi, un cinéma qui s'envisage possible ?

­ C'est un cinéma qui s'invente en direct, là, devant toi. Pas un cinéma référentiel, remâché, différé. Tu vois ?

­ Non.

­ Tu connais Edmond T. Gréville ?

­ J'ai lu 35 Ans dans la jungle du cinéma, ses mémoires, chez Actes Sud. Sur le Triangle de feu, il est presque dépréciatif, ton Grévi