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Libération

Farouche Argerich

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publié le 6 novembre 2002 à 1h41

On la croyait muette, et on découvre qu'elle parle. Elle, c'est Martha Argerich, la lionne argentine et dernière grande représentante du piano du XXe siècle. A part ressusciter Mozart et tourner un documentaire sur lui, on voit difficilement comment Georges Gachot aurait pu faire mieux pour créer l'événement. En guise de prologue à cette Conversation nocturne, Argerich explique à Gachot, en français, qu'elle vient de voir une émission du genre Big Brother et qu'elle n'est pas comme «ces exhibitionnistes qui veulent être filmés dans leur vie privée». A Gachot de se débrouiller avec ça, ce qu'il fait en alternant interventions parlées, images d'archives et plans d'autoroutes, mer déchaînée ou théâtres déserts.

Les fans seront impressionnés par la qualité des documents réunis : un Concerto no 1 de Liszt dirigé par Erich Leinsdorf, le mouvement lent du Concerto no 1 de Chopin avec l'orchestre de feu l'ORTF, le Concerto en sol de Ravel sous la baguette de Dutoit et Ma mère l'Oye à quatre mains avec Nelson Freire, ou encore Friedrich Gulda, qui fut son professeur à Vienne quand elle avait 13 ans, dans la sonate Clair de lune de Beethoven. «Je n'ai jamais rencontré de personne aussi douée de ma vie», dit-elle de son maître, avant d'ajouter qu'il lui a révélé l'humour du premier Beethoven ou de Prokofiev, quand, fraîche émoulue de Buenos Aires, elle se sentait prisonnière d'une tradition belcantiste et romantique du piano.

Au fur et à mesure apparaît l'écorchée vive, la timide qui jou