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Libération
Critique

Va savoir

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Canal + jaune, 00 h 45.
publié le 12 novembre 2002 à 1h44

Rien n'a l'air important là-dedans, on ne peut plus s'en défaire pourtant. Quelle est cette liturgie naturaliste, cette quadrature exaucée, cette valse à six temps ? «Là où croît le danger croît aussi ce qui sauve», citation d'Hölderlin, qui absout le chaos du monde et qu'un personnage profère avant de chuter dans le vide. Tout ça pour une citation belle comme un soulagement, pourquoi pas ? Va savoir, titre mutin pour un film qui en sait long mais n'en revendique pas moins une innocence. Car Va savoir où se nichent les fantômes de nos vies, dans quelles coulisses ils nous précèdent. Puisqu'ils mènent le jeu, il n'y a qu'à s'abandonner : c'est de cette injonction que relève l'art de Rivette. Le fantôme d'un amour mal mort et celui d'un manuscrit inédit de Goldoni orchestrent un chassé-croisé à six personnages en quête de leurres pour y voir plus clair. Camille croit aimer encore Pierre, qui vit maintenant avec Sonia, qui se laisse séduire par Arthur, qui est le demi-frère de Do, qui tombe amoureuse de Hugo, le metteur en scène et acteur italien en tournée à Paris avec la même Camille, sa comédienne et sa femme. Le théâtre encore et toujours, Rivette y revient comme à l'abreuvoir de tous les mensonges. Sentiments et mots : il inscrit leurs correspondances au coeur des cercles brisés qu'à chaque film il redessine. Quand on est hanté, c'est pour toujours, c'est pourquoi son cinéma semble ignorer la discontinuité, identique à lui-même dans son doux mouvement ondulatoire. Le théât