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Libération
Critique

Soweto à l'heure du sida

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publié le 30 novembre 2002 à 1h56

«Tu vas bien ?» «Oui, je bande !» Dès l'entrée du township, les copains de Dumisani Phakathi le replongent directement dans l'ambiance du quartier. Difficile ici de parler d'autre chose que de sexe. Surtout quand l'objet du film est le sida. Wa n'wina est un des documentaires de «Steps for the Future», l'ambitieuse série sur le sida en Afrique, lancée par les producteurs de Domi nant 7. Ici, ils ont remis la caméra entre les mains de ce jeune homme de 26 ans, lui-même né dans ce quartier de Soweto. Intuitivement, Dumisani Phakathi ne cherche pas à traiter son sujet, mais il balade sa caméra comme un oeil amical, curieux de retrouver les potes, de découvrir une fille qu'il n'avait pas remarquée.

Son irruption dans le township avec la caméra et le micro provoque les confidences de la belle Phumla, enceinte à 17 ans («je me conduis comme un garçon, c'est pour ça que je fais peur à mes parents»), des discussions à bâtons rompus entre jeunes sur l'élasticité du vagin, l'amour et l'alcool... Il saisit au vol quelques moments de la vie quotidienne. La femme qui ramasse le charbon usagé, la vieille si fière de sa nouvelle poubelle, les batailles d'eau dans la rue et les jeux de ballon avec les capotes dans les boîtes. Tout ce petit monde de misère et d'amour se laisse prendre dans son regard, l'entraîne parfois avec lui devant la caméra. Dumisani est dedans, dehors.

Son émotion à filmer son propre univers désintégré par le chômage et la maladie croît avec le tournage. Exsangue, c'est