Déjà auteure de Manhattan Charity, plongée édifiante chez les riches mécènes et donateurs new-yorkais qui montrait finement le charity business comme une perversion propre à la société ultralibérale américaine (Libération du 19 avril), Florence Martin-Kessler filme ici les nouveaux migrants à la porte du rêve américain. New York ayant connu ces dix dernières années une vague d'immigration comparable à celle du début du siècle, l'image d'Epinal de la ville cosmopolite, du melting-pot et de la Babel chaleureuse a la vie dure.
En suivant des émigrés russes, asiatiques et mexicains dans leurs démarches permettant l'accession à la citoyenneté américaine, le film écorne la carte postale d'un pays à la politique d'assimilation exemplaire. Le travail d'américanisation des associations qui aident les migrants à obtenir la naturalisation est montré avec précision : l'apprentissage de l'anglais, de l'hymne américain, de l'histoire américaine dans ses grandes lignes émancipatrices (le Mayflower plutôt que la guerre du Vietnam), les recommandations dans l'attente d'une loi d'amnistie (payer l'impôt sur le revenu en signe de bonne volonté), ou encore la répétition de l'entretien avec l'agent des services d'immigration: «Etiez-vous membre du Parti communiste ? Avez-vous aidé les nazis ? Faites-vous partie d'une organisation terroriste ?»
Mais, en contrepoint au prêche prosélytique d'une Amérique terre d'asile des opprimés et pays de la liberté, le film laisse entrevoir une réalité plus sombr