«Tu auras ton enfant là-bas.» On n'y prend pas garde d'abord. La sentence est noyée dans de longs plans, dans un ciel rayé d'une traîne d'avion, dans des cimes balayées par le vent. Pourtant, le fil de ce film étrange et poétique est là : celui de la filiation. On y est descendants de ferrailleurs espagnols égarés dans le Jura, ou arrière-petits-enfants des seuls survivants d'une région japonaise, décimée par la guerre et la famine. On y parle toponymie et étymologie, topographie et géologie... Un couple de scientifiques japonais, Yoshiko et Tôyô, vient s'installer aux Ferroz, un village du Jura, pour mener à bien des études sur les habitats religieux en région montagneuse. Tôyô, musicologue (Gen Shimaoka), obsédé par l'idée d'avoir un héritier, élabore un plan pour donner un enfant à sa femme...
La rencontre Jura-Japon apporte son lot de mécompréhensions cocasses : les Japonais déploient leurs estampes dans des armoires régionales et tentent de se dépêtrer des fils de la fondue de monsieur Perret... Mais plus étranges et intéressants sont les points de liaison entre les deux cultures. Et la quête des origines est la même pour l'archéologue (Katsuko Nakamura) ou l'institutrice jurassienne qui apprend à ses élèves l'histoire «dans le bon sens» : «D'aujourd'hui à hier, pour qu'ils comprennent...»
Point commun encore : la passion qu'éprouve pour ces deux régions du monde le réalisateur Yann Dedet, monteur de Pialat, Truffaut (les Deux Anglaises et le Continent, la Nuit américaine