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Libération
Critique

Le Liban entre les maux

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publié le 11 janvier 2003 à 21h45

Il faut s'arrêter sur le deuxième film de Ghassan Salhab. Ne pas hésiter à monter le son fort. Terra incognita est une symphonie contemporaine, fragmentée, ouverte et éclatée. Présenté en mai à Cannes dans la sélection Un certain regard, prévu pour sortir en salles le 12 février, Terra incognita s'avère un Lettres persanes à l'envers, une question en suspens, en quête d'un bilan sur le Liban d'aujourd'hui.

«Comment peut-on être Persan ?», demandaient niaisement les Parisiens aux seigneurs persans de Montesquieu. «Comment peut-on être libanais ?», semble rétorquer Ghassan Salhab. «Nous sommes au milieu d'un pont dont on ne sait s'il est construit ou détruit», explique le réalisateur libanais. En terre inconnue, la vie est un mélange de couches de destruction et de reconstruction. Après dix-sept années de guerres, on se place en terrain miné. On trouve des ruines historiques donc montrables (aux touristes) et des ruines nouvelles, donc infréquentables. Il y a les barres d'immeubles en carton-pâte du nouveau Beyrouth où tout le monde rêve d'habiter... et que tout le monde rêve de fuir. Dans Terra incognita, on adhère à langueur des deux héroïnes : Soraya, la guide touristique, et Leïla, la gothique mélancolique. A travers elles s'étoile un chassé-croisé entre plusieurs personnages. L'exilé qui revient avec l'espoir de conquérir ce qu'il avait laissé de délicieux sur place, l'architecte qui construit sa nouvelle Babylone. L'oeil perçant du cinéaste Ghassan Salhab plante des plans