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Libération
Critique

Attention, fragiles

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publié le 4 mars 2003 à 21h45

Les âmes fatiguées diront que le sujet est porteur : qui oserait penser du mal d'un grand prématuré et de parents qu'une caméra sait filmer et entendre. Les mêmes remarqueront que les grands prématurés sont un sujet comme la télévision les affectionne, ça fait pleurer, et en plus réfléchir. Mais le réalisateur Philippe Pichon et le journaliste Farid Ameur font ici belle oeuvre. Une fois passé les images d'une césarienne en gros plan que l'on n'est pas obligé de trouver glamour, on se laissera glisser dans ce documentaire tout entier penché sur les grands prématurés, petites «crevettes» nées avant 37 semaines de grossesse. On évitera de s'accrocher aux chiffres : un enfant de 780 grammes, ça ne dit réellement rien à personne. On écoutera bien plutôt Sonia et Mohammed dont la fille, Lina, vit au sein de l'unité de réanimation de l'Institut de puériculture de Paris. Là où les maîtres mots, ainsi que le dit Mohammed, sont «patience et espérance». Ils disent ce qu'il faut savoir imaginer, la peur du soir, l'espoir du matin, le refus de parler des séquelles que tout grand prématuré risque de porter. Dans la même harmonie, le chef adjoint de l'unité, Jean-François Magny, et l'une des gynécologues-obstétriciennes, Valérie Mirlesse. Le premier dit le quotidien de sa pratique : à partir de quand un médecin, face à un nouveau-né en détresse, doit défaire ce qu'a fait la médecine elle-même ? La seconde évoque le «sentiment d'incompétence» dont souffre une mère quand on lui extrait son e