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Libération
Critique

La Gueule ouverte

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Ciné Cinéma Succès, 20h45.
publié le 19 mars 2003 à 22h10

Une femme agonise (d'un cancer), et autour d'elle la vie continue, juste un peu plus lourde. Voilà, c'est tout. C'est gonflé. Sans souci excessif de la dramaturgie, Maurice Pialat filme la détresse muette d'un mari (Hubert Deschamps) et d'un fils (Philippe Léotard) qui tuent le temps en attendant la Faucheuse. Il ne s'agit pas de faire face à la mort qui vient, mais de faire avec. C'est d'ailleurs en la matière une règle assez générale.

Evidemment le spectateur ne s'embarque pas là-dedans de gaîté de coeur, d'autant que le film commence par un interminable plan fixe (réunissant le fils et la mère encore valide), lequel ne prendra tout son sens que bien plus tard. Pourtant, art de Pialat, ce cinéma indemne de toute afféterie va peu à peu nous irradier de sa lumière noire. C'est formidable, des images honnêtes, c'est-à-dire auxquelles on peut faire confiance, et un film tellement plus puissant que ceux à scénarios qui nous sont glissés sous les pieds comme des escaliers mécaniques.

Donc le père et le fils meublent leur temps comme ils peuvent, qui avec le pinard, qui avec le cul. Puis la mort survient, et là Pialat nous cloue avec trois plans séquences très fortiches. Un, brutalité du passage à l'état cadavérique : le corps de la mère est violemment dessapé et préparé pour le cercueil. Deux, résumé de la pompe funèbre en un plan unique : la caméra glisse lentement en travelling autour de l'église, découvrant peu à peu le corbillard et les gens qui attendent dehors la fin de la c