Cofondateur et rédacteur en chef des Cahiers du cinéma où il engagea Truffaut, Godard, Rivette et Chabrol, Jacques Doniol-Valcroze se serait révélé «meilleur défenseur du cinéma moderne par sa verve et par sa plume que par ses films». Le jugement un peu lapidaire de Jean-Michel Frodon (1) mérite quelques nuances. Aucun des longs métrages de Doniol-Valcroze n'atteint certes la puissance d'un Resnais ou la grâce d'un Rohmer, mais ses films des années 60 ne manquent pas d'intérêt. L'Eau à la bouche (1960, groupé avec la Dénonciation sur un DVD chez Opening) n'est pas seulement une délicieuse chanson de Serge Gainsbourg, mais aussi un marivaudage charmeur et élégant, porté par trois belles compagnes de route de la nouvelle vague (Bernardette Lafont, Alexandra Stewart, Françoise Brion). Dans un registre plus grave et un beau Cinémascope en noir et blanc , la Dénonciation (1962) pose le problème de la collaboration avec la justice à travers le personnage d'un producteur (Maurice Ronet) accusé d'un meurtre qu'il n'a pas commis.
Plus ambitieux encore, le Viol (1967) est un huis clos très chic sous influences croisées de Robbe-Grillet (pour la construction alambiquée) et de Bergman (pour l'étude psychologique et les gros plans féminins). Alors que son mari est à la chasse, une bourgeoise lymphatique (la bergmanienne Bibi Andersson) est séquestrée par un mystérieux tueur à gages (Bruno Cremer). Ils se méfient l'un de l'autre puis se rapprochent, badinent puis s'affrontent ; il préte