En Tunisie, les enfants ont plus souvent l'impression d'emboîter le pas aux générations précédentes que d'inventer de nouveaux modes de vie. Cela explique la curiosité qui s'est emparée de ce groupe de jeunes gens lorsque François Perri leur a expliqué le fonctionnement du sténopé, cette boîte de conserve percée d'un trou recouvert d'un adhésif noir et munie d'un négatif. Lors des premiers tirages, ce fut une révélation : pour la première fois certainement, ils ont l'occasion de jeter sur leur monde un regard de biais et personnel qui n'appartient qu'à eux et dont ils ne doivent rendre compte à personne. Alternant excursions photographiques et visites aux familles des enfants, l'équipe du réalisateur Guy Mouyal plonge pendant deux semaines au coeur de la Tunisie : traditions religieuses, cérémonie de la circoncision, prières à Dieu et aux morts, importance du rôle de la mère, la jeunesse tunisienne s'y découvre fêtée, éduquée, encadrée à tous les niveaux de la société.
Avec un traitement léger, enrobé de danses et de musiques populaires, ce sujet montre les tranches de ces vies arrachées de leur quotidien monotone. Cependant, l'intérêt de cette expérience photographique se trouve au-delà des images : elle cherche à souligner, à l'inverse de la liberté à laquelle goûtent ces enfants avec leurs boîtes de conserve, le poids immense que la famille et l'Etat exercent sur eux. C'est qu'il s'agit de la génération de la transition, celle à qui revient le devoir de faire fructifier le