Rossellini aurait été comme un coq en pâte à Bagdad. Il n'aurait pas fait comme Hitchcock. Hitchcock serait venu fin mars, il aurait envoyé ses belles images de propagande à Hollywood. Là-bas, son monteur personnel en aurait fait de beaux ciné-tracts à l'usage des pacifistes du monde entier. Il aurait essayé d'avoir Tom Cruise dans un rôle de GI, avec mitrailleuse en guise d'argument. Quelquefois, les mitrailleuses sont les meilleurs arguments, disait Hitchcock en 1943 à la BBC. Soixante ans plus tard, il aurait dit la même chose. Roberto Rossellini serait arrivé plus tard, en janvier 2004, avec une équipe complète, pour tourner Bagdad, ville ouverte, sa reconstitution en 35 mm de la libération de la ville. Il se serait fait livrer des pâtes fraîches et des truffes blanches par l'avion de Milan, tous les jours. Le plus drôle, c'est que Bagdad, ville ouverte aurait été son chef-d'oeuvre. Un chef-d'oeuvre d'ultranaturalisme braillard, désolé, militant.
Rappeler que Rossellini est un résistant de la dernière heure, un cinéaste ambigu, un Renoir. Plus vite on oubliera ses engagements fascistes, ses errements fascistes, mieux ce sera. L'important, c'est la lucidité presque irréelle de son réalisme d'après-guerre. Ce n'est pas parce qu'il attend que la guerre soit finie qu'il en parle moins bien. Néoréalisme, hyperréalisme, surréalisme avec lui, on ne sait plus où on est. La vie est là, la mort est là, c'est tout. Le cinéma de Rossellini brûle tellement que le naturalisme s'enfla