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Libération

La pierre

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publié le 14 avril 2003 à 22h47

C'est une horde, une petite bande hurlante et brutale. Des hommes qui ont capturé leur voleur de Bagdad. Ils sont cinq. Ils marchent dans la rue, ils tanguent en groupe autour de leur prise. Lui doit avoir 20 ans. Il avance plié, une main bloquée dans le dos. A distance sur le côté, un homme en chemise blanche boutonnée jusqu'au col regarde passer la milice et son prisonnier (1).

Barbu, solide, une kalachnikov à la main, celui qui mène le groupe donne un violent coup de poing à la tempe du pillard. Le garçon vacille, se protège de la main. Un vieillard en djellaba blanche s'approche. Il a les bras ouverts. Il implore, puis renonce. Un autre frappe le jeune homme. Chemise à carreaux de couleur, pistolet Beretta au poing, il jette un coup de pied terrible dans le ventre du maraudeur. La douleur le brise en deux. On le relève. D'autres coups encore, devant, derrière. Une claque de la paume, un choc du coude. Dix mains le maintiennent debout, le plient vers le sol, le relèvent lorsqu'il titube, le portent presque tant il ne peut marcher. Brusquement, un milicien empoigne le jeune homme par les cheveux et pose un pistolet sur sa tête. L'homme au fusil éloigne la main armée d'un revers de bras. L'autre recommence, frappe le front du canon de son automatique. Le voleur s'effondre. Il est relevé de force, encore et encore. «C'est un mauvais Irakien», hurle un homme face à la caméra. «Honte», dit un autre. Des doigts le désignent. Lui résiste. Il repousse du bras, il protège sa tête,