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Libération
Critique

Riz amer

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Ciné Cinéma Classic, 20 h 45.
publié le 25 avril 2003 à 23h00

La noirceur naturaliste du monde, on en fait quoi ? Pourquoi pas un «chef-d'oeuvre» du néoréalisme de la grande époque ? Riz amer est un film bâtard, traversé de mauvais pressentiments et de sentiments encore plus mauvais. Est-ce un bon film, d'abord ? Pas sûr. Tout ce qu'on sait, c'est qu'il est noir.

Tellement pessimiste qu'il en appelle à la surcharge pondérale la plus dramatique, au mélange des genres les plus sordides. Mélodrame sexuel, roman-photo, film de gangsters, opérette onirique, documentaire sur le tiers monde (l'Italie n'est pas un pays pauvre, c'est ce qu'on disait du temps où on disait des choses). Du coup, un Lourcelles s'énerve de ce mélange contre-nature d'éléments traditionnels et nouveaux, combinaison habile qui assura le succès commercial d'un film qu'il tient pour important, mais sans génie. L'ambiguïté de Riz amer, cette manière indécente de «jouer sur plusieurs tableaux», cette hétérogénéité qui irrite tant les partisans de la transparence, on la retrouve aujourd'hui, presque sublimée, dans un feuilleton télé comme Boston public, l'oeuvre magnifique de l'un des héritiers les plus atypiques du néoréalisme, David E. Kelley. On peut aussi hasarder que l'érotisation excessive du film de Giuseppe De Santis, cette sentimentalisation torride, ce mélange de sociologie ouvrière et d'appel à la libération des femmes (ces femmes qui chantent dans les rizières, derrière la sculpturale Silvana Mangano), annoncent le lyrisme postbrechtien de Fassbinder.

Un poster de