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Libération
Critique

Brakhage visionnaire

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publié le 28 avril 2003 à 23h02

Mort le 9 mars 2003 à 70 ans, l'un des grands noms du cinéma expérimental, le réalisateur américain visionnaire, Stan Brakhage, n'aura pour seul et unique hommage que l'émission de ce soir. Merci Arte. Mouvements infinis, collages, chocs de montage, trous noirs, rayures, figures oniriques, films initiatiquesÊou journal intime «lyrique et mythopoétique» selon P. Adams Sitney (1) le cinéma de Brakhage transcende les formes, le temps et toute idée d'appréhension. Comme Henri Michaux avec l'écriture, Jackson Pollock avec la peinture, Stan Brakhage n'a eu de cesse d'interroger son art. Brakhage est un ours qui a peur de trop vite signifier.

Dans son cinéma on s'encule moins que chez Kenneth Anger, on y parle moins que chez Jonas Mekas et on n'a moins le temps (de voir) que chez Nathaniel Dorsky. On range vite ses quatre cents films selon deux périodes : l'une lyrique, l'autre abstraite. Ce soir, face à l'oeil aiguisé du cinéaste et critique Pip Chodorov qui lui a rendu visite en janvier 2003 au Canada, il explique en toute bonhomie sa théorie. Brakhage a voulu saper la connaissance froide pour délivrer le regard. Ses films sont autant de formes, de poèmes et de cris. Cela va vite et c'est là tout le problème de son cinéma. A force d'aller à la vitesse du cinéma, cela va trop vite. Il reste pourtant une intention, la nôtre: rester scotché. Sur la fin de sa vie ­ crachats, poussières, rayures, collures ­ Brakhage peignait sur la pellicule. Il faisait vingt-quatre Jackson Pollock par