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Libération

La porte

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publié le 16 mai 2003 à 23h01

Raphaël a quinze mois. Il rentre de crèche avec Martine, l'assistante maternelle. Martine pousse une lourde porte, puis une autre à barreaux blancs. Autour d'eux, il y a cette résonance particulière aux lieux clos. Cet écho métallique, cette réverbération de coursive, glaciale et inquiétante, qui taille chaque voix en éclats et fait prendre les chocs pour des coups. Nous sommes à la prison des Baumettes à Marseille. Cela fait deux ans que Diana est incarcérée. Chaque matin, l'enfant passe les portes de la prison. De retour en cellule, Martine donne à Diana le livret de liaison (1).

La jeune détenue est vénézuélienne. Elle a du mal à lire le français. Elle tend le cahier vert à la gardienne. Nous sommes dans la cellule étroite. L'enfant est dans les bras de sa mère. La gardienne lit. «Aujourd'hui, Raphaël a passé une bonne journée. Il a bien dormi, mais s'est réveillé en sursaut. Bon repas. Il a mangé des épinards avec du poisson, de la pizza, du gâteau. Il a eu trois selles normales.» La gardienne traduit en souriant : «Trois cacas normaux.» Diana est contente. La gardienne câline un peu. «C'est un petit bébé, ça», dit-elle en chatouillant Raphaël. Il lui tend une cuillère, elle le remercie en riant. «C'est différent de travailler dans un quartier où il a des enfants ?», demande la journaliste. «Oui... Parce qu'on a une autre... Heu... On est...» En regardant Diana, la surveillante pose une main apaisante sur son bras. «Je ne sais pas comment dire. En fait, on a une autre app