«L'homme que vous allez découvrir aurait passé plus de vingt ans caché dans un abri, parce qu'il était opposé au régime», nous dit David Pujadas. Ce qui va suivre n'est pas présenté comme un reportage, mais comme un «récit». Nous ne savons pas qui a tourné ces images, ni quand elles l'ont été (1).
Il s'appelle Amir Jawad, il est irakien et vit à Jobah. Il n'a pas de regard. Il est décharné. Son visage est un masque de mort, son corps une ombre frêle. Il dit : «Lorsque j'ai senti le danger, je me suis réfugié dans la maison de mes parents. J'ai ensuite préparé cette cachette pour que personne ne puisse me dénoncer au régime.» Il nous emmène dans son abri. Nous le suivons. C'est une cavité étroite creusée dans le sol. Pour s'y glisser, il rentre les épaules. Nous le voyons d'en haut. Ses cheveux gris, ses mains qui tirent un carton épais pour masquer le trou. Le voilà entre deux murs, nous dit le récit. Au-dessus de lui, dans ce boyau sombre, il a creusé une autre excavation. C'est de dos qu'il y accède, un pied en appui et à la force des bras. Voilà. Il s'assied sur le ciment puis referme la trappe. C'est là. La cache fait un mètre de large. Trois peut-être, dans le sens de la longueur. En tailleur, ses genoux heurtent les parois. Il a installé deux petites étagères sous le plafond bas, et rangé ses outils de naufragé. Une bassine métallique, un plat, des bocaux, quelques boîtes, un jerrican, un petit ventilateur. Les murs sont de moellons nus. Une lampe-torche est accrochée à