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Libération
Critique

Mon père, ce nazi.

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publié le 30 mai 2003 à 23h12

Quand elle a vu, dans le film, l'acteur jaillir de la voiture, elle a tout de suite su que c'était lui, son père. «On n'aurait pas trouvé meilleur acteur que Ralph Fiennes», dit-elle, exactement ce que sa mère lui avait raconté de son père. Quand son père tire sur les juifs du camp, torse nu, clope au bec, il y a «une drôle de femme derrière, au lit. Je ne peux pas croire que c'était ma mère. Il a tiré, mais pas avec elle dans le lit. Et puis la femme dit : "Va faire du café." Typique de ma mère. Comment Spielberg a-t-il su ça ?» Le père ? Amon Göth, le psychopathe commandant du camp de concentration de Plaszow, figure diabolique de la Liste de Schindler. La mère ? Irene, la belle compagne de Göth, comédienne, amie de Schindler qui l'a présentée au nazi. La fille ? Monika Göth, héritière et narratrice d'une filiation impossible, née en novembre 1945. Face à la caméra de Markus Kessler, cette femme brune en blouse rose, qui n'a jamais connu son père, doute, se débat, tente de les défendre l'un et l'autre, toujours sincère. Elle défend sa mère, présentée selon elle comme «la catin de Plaszow : c'est pour ça que Spielberg m'est devenu antipathique. Je peux comprendre sa haine des SS. Mais elle n'a rien fait de mal». Elle était là, avec lui dans le camp, «la reine de Plaszow et mon père le maître absolu», l'histoire d'un grand amour : Irene était «obsédée et fascinée par Göth, elle n'a vu que lui, elle n'a jamais eu un mot négatif sur cet homme. Il était très intelligent, cultiv