Prâk Khân est un tortionnaire. Un homme qui interrogeait, humiliait, maltraitait et tuait. Nay Nân a été l'une de ses victimes. Avant son arrestation, elle travaillait dans un hôpital. Elle avait dix-neuf ans, il n'était pas plus vieux. Aujourd'hui, pour le réalisateur Rithy Panh, l'ancien khmer rouge parle. Nous le voyons assis sur le sol d'une cellule du Tuol Sleng-S21, à Phnom Penh. C'était un centre d'interrogatoire, une prison, un lieu où l'on donnait la mort. Prâk Khân raconte. Entre ses mains, il tient la photo de Nay Nân. C'est l'image d'une captive. La jeune fille est soucieuse mais son regard est droit. Ses cheveux sont passés derrière ses oreilles. Autour de son cou, une étiquette de prisonnier (1).
«J'ai interrogé cette jeune fille pendant quatre ou cinq jours sans obtenir de réponse. Elle disait ne rien savoir. J'ai insisté. A quelle organisation elle appartenait ? Quelles étaient ses relations ? Le chef de son unité ? J'ai demandé l'avis de mes supérieurs. Ils m'ont dit d'utiliser la manière forte, de la terroriser. J'ai suivi leur avis. Je l'ai insultée, intimidée, j'ai tapé sur la table. J'ai pris une branche et je l'ai frappée. Elle en a pissé de peur. Quand je l'ai frappé, elle a pissé sur elle. Alors elle a demandé à faire des aveux. Je les lui ai fait écrire sur quatre ou cinq jours. J'ai obtenu une page. En la lisant, je ne savais pas de quel réseau il s'agissait. Alors je lui ai expliqué, et recommandé d'écrire selon ma méthode : il faut décrire un parti