Ciné Cinéma Classic, 23 heures.
On le met où, Otto Preminger ? En ces temps de dérégulation cinéphilique, d'affolement postcinéma, qu'est-ce qu'on fait de son fantastique social décalé, plus onirique que réaliste ? Pour peu qu'on fasse du rangement, dans quelle catégorie transcendantale classer ses films, aussi cruels que féeriques ? Faut-il les aligner aux côtés d'autres films de grands producteurs, Lubitsch, Hitchcock, DeMille ? Ou sont-ils mieux assortis avec les chefs-d'oeuvre de transparence radicale des deux grands lyriques dont on parlait l'autre jour, Mizoguchi et Ophuls ? Ce qui est sûr, c'est qu'on voit mal la parenté qui existe entre Crime passionnel, un Preminger éblouissant de virtuosité amoureuse que l'ami Godard aimait tant, et le chanteur Christophe (qui l'a choisi dans sa sélection de films sur Canal Sat). Sauf à considérer que cette quête éperdue de rédemption sentimentale relève du film noir, genre un peu kitsch que se doit d'adorer un collectionneur de voitures de sport à la voix d'enfant de choeur qui n'aurait pas mué. Considérer quand même, au bout du compte, «l'élégance formelle du film, ce mélange stylisé de fascination et de recul qui enferme le spectateur dans un prisme parfait» (Lourcelles) comme la définition presque idéale de certaines des jolies chansons de jeunesse de Christophe.
Réalisé sur la lancée de Laura, avec le même impassible et impeccable Dana Andrews, Crime passionnel se suffit à sa propre fascination. A la place de l'immaculée Gene Ti