C'est en mars, alors que l'assaut anglo-saxon se préparait contre l'Irak, que le journaliste Saïd Bakhtaoui s'est rendu en Arabie Saoudite, le pays des Bédouins et du pétrole, des dollars et de Ben Laden. Son but : aller à la rencontre du Saoudien «de base», comprendre quelle est sa liberté dans un pays islamique qui suit la charia à la lettre, et où l'on ne trouve, par conséquent, «ni bibliothèque publique, ni théâtre, ni cinéma». Résultat : des «paroles voilées» comme l'annonce le titre du reportage, voilées par la pudeur des femmes qui témoignent protégées par de grandes tuniques noires («pour ne pas attirer l'attention des hommes»), voilées par la gêne de ces hommes eux-mêmes vêtus de grandes tuniques blanches, et qui finissent par avouer : «Dans ce pays, si on réfléchit, on devient dangereux.»
Inondé par l'argent du pétrole, le pays est sommé de se dire heureux. Ici, la médecine est gratuite mais hommes et femmes ne se mélangent pas, les centres commerciaux sont dernier cri mais doivent fermer leurs portes, sous le contrôle de la police religieuse, cinq fois par jour pour la prière, les riches sont immensément riches mais les pauvres (des étrangers, ils sont cinq millions, souvent pakistanais, indiens, etc.) gagnent à peine 500 euros par mois.
Dans la prestigieuse université de Riyad, Bakhtaoui sympathise avec une bande d'étudiants en français. Certains soutiennent sans réserve le régime, dont ils espèrent devenir les caciques ; d'autres, après plusieurs rencontres, finis