Sept mois à peine après la chute de Saddam Hussein, la chaîne NBC s'apprête à diffuser un téléfilm sur la «libération» rocambolesque et douteuse de la GI Jessica Lynch. Juste retour des choses : le producteur hollywoodien Jerry Bruckheimer (Top Gun, Pearl Harbor) n'est-il pas soupçonné d'avoir aidé les militaires à mettre en scène le «vrai» sauvetage héroïque de la soldate prisonnière dans un hôpital irakien ?
Pour cette mise en fiction d'une réalité elle-même plutôt fictive, NBC a demandé au ministère de la Défense le prêt d'un hélicoptère et de chars. «Parce qu'ils sont meilleur marché que chez Hertz et Avis», plaisante à peine le producteur exécutif de Sauvez Jessica Lynch. Ce soutien logistique a un coût, longuement détaillé dans ce documentaire efficace de l'agence Capa. Les militaires exigent des changements sur le scénario avant de donner leur accord, puis se font projeter les rushes des scènes tournées. Certains réalisateurs parviennent par ruse à piéger la censure kaki (John Woo pour Windtalkers), mais la plupart doivent capituler : pour la Chute du faucon noir, Ridley Scott a dû couper une scène de combat pourtant authentique où les Rangers se faisaient canarder par leurs propres forces spéciales. On s'en doute, aucun des grands films de guerre critiques sur le Vietnam (Apocalypse Now, Voyage au bout de l'enfer, Platoon...) n'a reçu le soutien du Pentagone. Et même une bluette a priori inoffensive comme Forrest Gump peut se faire retoquer. Motif : le héros, trop