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Libération
Critique

L'enfance sur le vif

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publié le 20 novembre 2003 à 1h58

Jacques Duez est belge et ancien professeur de morale à l'école primaire, laïque, de Fauroeulx. Pendant vingt ans, il a filmé ses élèves. Images tremblées, un peu sales, en noir et blanc, améliorées d'année en année. Une sacrée collection qu'Arte a diffusé toute cette semaine, que l'on enverrait volontiers en recommandé avec accusé de réception à tous ceux qui entendent guérir l'Education nationale française et la laïcité.

Premier regard, les amateurs de mots d'enfants se régalent, comme aujourd'hui, lors de cette discussion sur les choses de l'amour (pour des raisons techniques, nous n'avons pu visionner cet épisode), et demain où Frédéric, Stéphanie et les autres se creusent les méninges pour définir deux ou trois petites choses ­ la triche, la conscience, la responsabilité. Du bien croquignolet : la dialectique de Stéphanie sur la triche est une leçon et 20 sur 20 à Frédéric, le malin aux yeux tendres : «Monsieur, il montre qu'il est intelligent, ben peut-être que nous aussi, on va l'être... Ça vient pas tout de suite comme ça.»

Au-delà du toujours suspect sourire face aux mouflets, ce qui marque dans cette expérience, c'est la naissance de la parole, de sa conscience, à quoi parvient Jacques Duez. Lui-même l'avoue, dans les premiers mois de ses cours, il n'aimait pas ses questions. Trop floues. C'est à sa découverte de la philosophie qu'il doit, dit-il, d'avoir su mener ses cours. Lentement, un seul précepte a prévalu : «La réponse est la malédiction de la question.» Et c'