Menu
Libération
Critique

Le monde de Morder

Article réservé aux abonnés
publié le 26 novembre 2003 à 2h03

Chez Morder, souvent, l'été à Paris est caniculaire. C'est donc par un beau jour d'été caniculaire que commence cette extravagante enquête sur un détective privé (Enquêtes en tous genres) qui donne son surnom au film, Assoud le Buffle. Egal à lui-même, Joseph Morder ne s'embarrasse d'aucune obligation narrative et le film semble avancer le nez au vent, au gré de ses cogitations intérieures, secoué comme une caméra tournant en rollers sur les pavés. Il arrive pourtant quelque part, Morder, mais jamais là où on l'attend. Cette histoire loufoque d'un type filant une fille qui le surveille revient évidemment, en passant par la fiction, à la forme fondatrice du cinéma de Morder, le journal intime.

Cette autofiction, ici conduite à un rythme étourdissant, témoigne de la virtuosité croissante de ce cinéaste «en tous genres» qui aligne les images depuis 1966, en vrai professionnel de l'amateurisme. Près de quarante ans qu'il tourne. Avec une Instamatic Kodak pour commencer, puis une super 8 muette, une super 8 sonore, enfin de la vidéo ou du 16 mm. Une production aussi prolifique (près de 550 films !) que confidentielle dont le public a des nouvelles de temps à autre. Le temps d'un festival ou, comme ici, d'un programme télé. Emule de l'Américain Jonas Mekas ou fils spirituel de Marcel Hanoun, il livre en préambule une sorte d'autoportrait en cinq minutes chrono qui découvre sur le mode Je me souviens une bribe de son credo de cinéaste : «Peut-on filmer un rêve ?» C'est du moins la q