A oeuvre abrupte, commentaire direct. Loulou (1979) est un film plein de trous. Sans début, sans fin et, d'ailleurs, sans véritable histoire. Sans repères sociaux et psychologiques pour ses personnages, sans ces astuces dramatiques qui font office de rustines pour des scénarios crevés. Mais, comme l'explique Pascal Mérigeau dans sa biographie de Pialat (éd. Denoël), «la force du film tient aussi à ce manque, qui devient vite refus d'expliquer, de surligner». Alors c'est quoi Loulou ? Un canevas banal de triangle amoureux, inspiré comme souvent par la vie du réalisateur. Nelly, une jeune bourgeoise (Isabelle Huppert) plaque son mari André (Guy Marchand) pour un loulou de banlieue (Gérard Depardieu, comme sorti des Valseuses). Ça explose, ça crie, ça se tape dessus et ce n'est pas du cinéma, comme si la tension même d'un tournage chaotique avait généré ce bloc de vie compact. C'est la force de Pialat : donner une impression de naturel, de vérité sans que l'on voie le travail de composition ou plutôt de mise en conditions en amont. Le film est encadré par deux scènes de groupe impressionnantes, deux précipités du cinéma de Pialat tout entier, de sa conception de la mise en scène comme prise de risque totale. Au début, une scène de boîte de nuit, qui condense tout ce qui va suivre : le trio infernal mais aussi les proches (Pialat est un grand cinéaste des seconds rôles), les rires et les baffes, André qui jette Nelly puis lui court après, Loulou qui fout la merde, sort du ca
Critique
Loulou
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par Samuel DOUHAIRE
publié le 15 décembre 2003 à 2h20
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