Deux vieux juifs. Ils parlent, ils pleurent. Deux cascades de larmes, de vrais violons. Malik parle le premier, Malek attend pour répondre. Il attend, des sanglots dans la voix.
Dis-moi, Malek, les juifs sont-ils faits pour rire ou pour pleurer ?
Sacrée question.
Question sacrée plutôt.
Trop calé pour moi.
Moi, je sais.
Tu sais tout.
Pas tout. Mais ça, je le sais. Un juif ne pleure pas. Il ne doit pas.
Jamais ?
Jamais.
Même pour un deuil ?
Pour un deuil, oui. Mais c'est réglé. Tant de jours de tristesse autorisés. Tant de jours de larmes, pas plus. Après, on fait la fête.
Chez nous, on fait toujours la fête.
Tu exagères. Comme toujours.
Non. Relis le Baal Shem Tov. Dieu vomit les tièdes. Il n'aime pas les mélancoliques. Il aime que son peuple fasse la fête. Qu'il danse, qu'il se réjouisse, qu'il soit joyeux. Le pire péché, c'est le péché de tristesse.
De mélancolie ?
C'est ça.
On dit pourtant tout le temps que le juif est mélancolique.
On dit aussi qu'il a les mains et le nez crochus.
Pour le nez, ça reste entre nous, on en connaît. Pas vrai ?
Tu attends que je te parle du Golem ?
Oui.
C'est la création supposée d'un Adam bis, un Golem, un Frankenstein.
Qui dit ça ? La Kabbale ?
Non. Les nazis. Les prénazis, plutôt.
Le film est nazi alors ?
Si tu veux. Disons que c'est la version prénazie du Dibbouk.
Le Dibbouk, c'est quoi ?
L'histoire d'un démon qui s'installe dans le corps d'une jeune femme, une jeune veuve. En vérité, c'est son mari. Il ne veut