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Libération
Critique

Questions de vies et de morts.

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publié le 9 juin 2005 à 2h32

Valérie Winckler aime les frontières. Celle que l'on franchit au sortir du ventre maternel, premier cri, celle que l'on passe, ultime souffle du corps. Depuis de longues années, elle regarde des petits venir au monde, des hommes et des femmes le quitter. Elle ne prétend pas nous introduire au coeur de ces aventures intimes. Elle se tient, et si bien, à l'extérieur. A distance. Hier, elle photographiait ses corps, et voici qu'aujourd'hui, dans une maternité et dans une unité de soins palliatifs, elle les filme dans l'ordinaire de leur vie à venir, passée.

Dit comme ça, la chose peut paraître rebutante. On craint même un instant de se trouver face à un énième documentaire sur les mystères prétendument sondés de la vie in utero, sur la dignité des mourants. Par bonheur, Valérie Winckler, la finesse même, a autre chose à nous offrir qu'une intrusion en couleur dans un ventre maternel. Telle une main, par exemple, sur le visage, sur le torse, sur l'épaule duveteuse d'un mouflet à peine né. Et l'on se dit, fugitive pensée, qu'il est heureux qu'une main ne parle pas, elle a autre chose à faire. Elle caresse, elle apprend à toucher, elle échange de la chaleur.

Mais voici un visage. Celui d'une femme qui porte toujours des coiffures rouges, qui parle avec un accent russe. Elle est sur un lit et elle dit sa «curiosité à mourir pour savoir». Tout de suite, le spectateur aime cette femme qui parle d'elle comme d'une intellectuelle «snob et orgueilleuse», mais aussi comme d'une «chrysalide