Duras chez la mafia, Rosetta à Palerme, les Affranchis dans une boîte à chaussures, les Parapluies de Cherbourg en Italie. Angela (2002), de Roberta Torre, fait la nique à toutes les catégories, obéissant à sa singularité fiévreuse, à son audace dédaigneuse, réunissant, sans qu'il soit possible de les séparer les unes des autres, beaucoup de choses aimées du cinéma. Angela, imper flottant sur ses jambes, parapluie mauve, arpente les rues du vieux Palerme, livre des paires de chaussures, puis revient à son magasin de poupée, royaume de boîtes entassées et de mots chuchotés. A l'étage, dans un cagibi, le bureau de Saro, parrain local (gros dealer de drogue) et son mari, entouré de ses comparses, orchestrant des transactions juteuses sous les montagnes de carton. Les mains d'Angela glissant les sacs d'illégalité dans les cous-de-pied des chaussures, sa silhouette traversant le marché, revenant, repartant, se cachant, reprenant la stature d'une honnête commerçante derrière sa vitrine miteuse. Routine, ennui, soumission. L'arrivée de Masino, neveu de Saro, jeune et beau, les yeux doux à Angela qui épie les hommes derrière ses boîtes, puis l'amour, la tromperie, Angela deux fois coupable, puis l'irruption de la loi (l'officine était sur écoute), détention, procès...
Radioscopie, filmée au plus près des visages et des corps, d'une femme dépecée par trop de choix qui ne sont pas les siens, incapable d'évasion, encaissant son sort avec autant de fierté que d'ignorance. Film étonnant p