Voici Rehan, et voici Tanvir. Rehan porte une lourde barbe, une calotte brodée, une longue tunique, un pantalon ample. Sur son épaule, il a jeté un patou de laine, le châle des hommes. Barbe taillée, chemise, veste occidentale et pantalon à pli, Tanvir marche mains dans les poches. Nous sommes près de Muzaffarabad, Cachemire pakistanais. Quelques heures après le séisme du 8 octobre, le Parti de la prédication a envoyé dans les villages martyrs Rehan et 10 000 émissaires. Contre une aide humanitaire, le parti prône l'islam des jihadistes aux populations traumatisées. Ancien jihadiste lui-même et directeur d'écoles mixtes, Tanvir a vu ses établissements détruits par le tremblement de terre. Rehan lève des écoles coraniques. Tanvir met en garde contre l'islamisme (1).
Un corps vient d'être retiré des décombres. Rehan le porte en terre avec quelque villageois. «Dieu a anéanti les pêcheurs dans la catastrophe. Il ne leur a pas laissé le temps de demander pardon. Il les a punis pour le jeu, l'alcool, le sexe avant le mariage, le prêt avec intérêt, tout ce qui est formellement interdit par l'islam», nous dit Rehan. «Oubliez la peur ! Soyez rassurés !», lance Tanvir à une assemblée d'écoliers, filles et garçons mêlés dans la petite cour. Il nous fait visiter leurs salles de classes dévastées. «Vous voyez tous ces dessins sur les murs ? Ce sont nos enfants qui les ont faits. Vous ne pourriez pas voir ça dans une école coranique. D'abord, tout serait écrit en urdu, la langue du Pakista