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Critique

Simone Barbès ou la vertu

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CinéCinéma Auteur, 19 heures.
publié le 7 décembre 2005 à 4h51

La tristesse et le glamour auront eu un enfant illégitime, ce film de Marie-Claude Treilhou tombé du ciel des années 80, l'une des plus émouvantes bouteilles à la mer de l'archipel Diagonale (initié par Paul Vecchiali dans les années 70). Un film qui fait sentir la lenteur du temps, la laideur hasardeuse du monde, la difficulté presque respiratoire d'être là. Dans le hall d'un cinéma porno, deux ouvreuses se crêpent le chignon, font les cent pas, accompagnent les spectateurs, taillent le bout de gras avec les habitués. La démystification de la pornographie opère à plein, les filles bâillant sur le fond sonore gémissant en provenance des salles, mais elles sont également comme deux chattes désirantes et désirables, félines et agressives, lucides et gouailleuses, orchestrant avec trois fois rien un ballet de réminiscences où se croisent Arletty et le Paris populaire du cinéma.

Il s'agit de la nuit d'une ouvreuse de cinéma. Une nuit de cinéma comme on n'en fait plus. Simone Barbès (incroyable Ingrid Bourgoin) est un mystère de Paris, elle est la personnification de ce drôle d'état qui n'arrive pas à choisir entre l'accablement et l'excitation, les illusions perdues et une féroce envie de vivre, état spécifiquement noctambule qui fonctionne comme une drogue. Qu'elle filme une moquette murale et deux pauvres chaises, un club lesbien ni minable ni merveilleux où se produisent des amazones tocardes et une rockeuse endiablée, et où Simone se lasse d'attendre sa copine, Treilhou crée