Harvey Pekar vient s'ajouter à la liste des antihéros américains, qui, à la toute-puissance habituellement affichée, opposent leur vision déprimée, pour ne pas dire dégoûtée, de l'existence. Mais finalement, la négativité promue par un Pekar n'est que l'envers de la positivité écoeurante de l'autre camp. On ne peut cependant que l'aimer, ce Pekar. Il râle et se désespère, ne supporte pas sa solitude, est allergique au couple, trouve tout nul... Pekar le tocard, le nerd, le loser de la mort. Mais il a cette lucidité et cette capacité d'analyse, de décortication de l'absurdité fondamentale qui le rend précieux. Harvey Pekar était documentaliste dans un hôpital de Cleveland et collectionneur compulsif de disques de jazz. Un jour, il tomba sur le dessinateur Crumb, qui devint célèbre, l'incitant à raconter sa vie morose, que lui dessinerait (d'autres prirent ensuite la relève). Voilà comment naquit American Splendor, le comic book qui sortit Pekar de l'anonymat (pas du marasme existentiel). Robert Pulcini et Shari Springer Berman, également documentaristes, construisent leur Pekar-film comme un patchwork : la fiction, qui raconte la non-vie de Pekar (avec Paul Giamatti abusant un peu du plissement dubitatif des sinus), avance encadrée par la BD (force de frappe du dessin) et par des apparitions du vrai Pekar, qui apporte son approbation hésitante (manifestement pas très certain que toutes ces duplications incessantes de lui-même soient vraiment nécessaires), accompagnées des arc
Critique
American Splendor
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par Isabelle POTEL
publié le 8 décembre 2005 à 4h52
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