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Libération
Critique

Cavalier, c'est Bonnard

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publié le 11 février 2006 à 20h19

Alain Cavalier le filmeur aime les baignoires. On ne saurait trop s'en féliciter. Pierre Bonnard aimait les baignoires. On s'en félicite ces jours-ci à Paris, où le musée d'Art moderne expose une rétrospective de l'oeuvre du peintre (Libération du 2 février). En guise de préparation, Alain Cavalier nous invite à mirer l'eau de celle, récemment rafraîchie, d'un énième bain de Marthe. Le cinéaste se promène dans les réserves du musée d'Art moderne. Heureux homme ! «Je suis allé voir des Bonnard (...). J'en ai trouvé un, mais je l'ai trouvé un peu encrassé. Il avait perdu de sa lumière. Alors, j'ai suggéré que peut-être on pourrait le nettoyer et ça m'a été accordé.»

On voit donc les mains habiles d'un couple de restaurateurs, monsieur et madame Le Dantec, lentement exhausser la toile vers la lumière. On apprend qu'un peu d'eau déminéralisée et de «tensioactifs» font des miracles. Réapparition des blancs, des vibrations et de la profondeur de la lumière. Le tableau renaît, le cinéaste peut rêver. Il baguenaude dans la vie de Bonnard qui gagna sa vie en peignant «des intérieurs bourgeois, des paysages et des nus». Stigmatisé par les «peintres abstraits qui prenaient le pouvoir», il pensait qu'il fallait partir de la réalité. Elle s'appelle Marthe. Jusqu'à sa mort en 1942, elle est son modèle préféré. Il n'en finit pas d'étudier ce corps du désir, endormi, mais bien plus souvent au bain. L'eau miroir, mystère. Le corps de la femme dans l'eau du bain, «c'est une présence et en même