Minsk envoyée spéciale
Des figurants jouant les homosexuels pour illustrer un congrès de l'opposition, des images de sachets de drogue et de revues pornos intercalées parmi les reportages sur les jeunes opposants... Regarder la télévision biélorusse (BT, Belarouskoe Televidenie) est une épreuve redoutable pour les nerfs ou la santé mentale, et contribue pour beaucoup à l'abrutissement général du pays.
Ivrognes et débauchés. Lors de la campagne pour l'élection présidentielle du 19 mars, au terme de laquelle Alexandre Loukachenko s'est proclamé réélu avec 83 % des voix, BT n'aura cessé de montrer des images violentes d'Ukraine, de Géorgie, du Kirghizistan et de France, pour expliquer comment la Biélorussie était un havre de «stabilité» au milieu d'un monde à feu et à sang. Dans la semaine qui a suivi, les quelques milliers de courageux qui ont osé protester contre la falsification du scrutin n'auront été présentés par BT que comme des vauriens, ivrognes, homosexuels, débauchés et brutaux, armés de barres de fer. La télévision biélorusse ment en permanence, sans que personne à ce jour n'y puisse rien.
Dans la foule des jeunes, étudiants pour la plupart, qui ont campé trois jours sur la place d'Octobre, BT ou «KGB-T», comme on surnomme cette télévision, tant elle est liée aux services secrets hérités de l'ère soviétique, avait placé son propre «manifestant», une jeune fille à l'air très abruti, qui fut la seule interviewée, pour expliquer comment elle s'amusait à boire de l'alcool