En 2004 en France, 7 000 personnes ont découvert leur séropositivité, 1 500 ont développé un sida. Une recrudescence inquiétante, particulièrement chez les gays et les hétérosexuels originaires d'Afrique subsaharienne, corrélative à l'idée, hélas erronée, qu'aujourd'hui la maladie se soigne, et au relâchement conséquent des pratiques sexuelles protégées. Certes, depuis une dizaine d'années, l'efficacité des trithérapies ne fait aucun doute, qui a contribué à limiter le nombre des décès. Mais une conséquence tout aussi tangible s'impose : désormais il faut vivre avec sa séropositivité de plus en plus longtemps : «L'arrivée des trithérapies, c'est un immense espoir, c'est aussi une grande tristesse pour tous ceux qui n'ont pas pu en profiter...» Il a fallu «faire le deuil du deuil, faire le deuil d'une démarche de vie au jour le jour dans laquelle on s'était inscrit. Et tout d'un coup re-envisager que ça allait peut-être durer dix, quinze, vingt ans, on n'en sait rien... C'était d'une violence extrême».
Interviewés pendant plusieurs mois par Michel Pomarède, des hommes et des femmes séropositifs témoignent de cette vie retrouvée et de leur stratégie face à la maladie. «On peut vivre avec et vivre plutôt bien», se risque l'un d'eux pour dédramatiser. Mais dans les faits, les choses ne sont pas si simples, le virus s'insinue au quotidien dans les esprits aussi. Indépendamment du parcours des uns et des autres, de l'origine de leur contamination, les témoignages convergent souvent