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Libération
Critique

La Prisonnière

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CinéCinéma Classic, 20 h 45.
publié le 7 août 2006 à 22h52

Selon la «politique des auteurs», ce concept forgé par les jeunes rebelles des Cahiers du cinéma au mitan des années 50, le dernier film d'un authentique cinéaste est forcément son plus beau. Comme si l'oeuvre ultime était forcément habitée par la liberté d'esprit, voire le regain de jeunesse d'un vieil artiste conscient de sa mort prochaine... Quand il tourne son dernier long métrage (mais son premier en couleur), Henri-Georges Clouzot a encore dix années à vivre, mais, malade du coeur, il a déjà frôlé la mort à plusieurs reprises. Il faudrait être de mauvaise foi pour considérer la Prisonnière (1967-1968) comme son meilleur film ; mais du strict point de vue du renouveau créatif, quelle claque ! En piochant son inspiration visuelle du côté de l'art cinétique cher à Vasarely, Clouzot a réalisé un film quasiment expérimental dans la forme. Quant au fond, jamais le réalisateur du Corbeau, pourtant peu suspect d'optimisme et de philanthropie, n'avait poussé aussi loin la noirceur que dans ce mélodrame sur le voyeurisme et la soumission, curieux mélange de Belle de jour (Luis Buñuel) et du Voyeur (Michael Powell).

La Prisonnière est d'autant plus dérangeant qu'il est le film le plus autobiographique de son auteur, le plus sincère quant à l'exposition de ses fantasmes. Comment ne pas voir dans le héros du film cet artiste impuissant qui photographie les femmes pour les posséder, un double non refoulé de Clouzot ? Comment ne pas voir dans