Retrouver Sartre est un plaisir, surtout quand on ne l'a pas connu : ses phrases valent toujours mieux que ses erreurs. Et comme il est d'abord écrivain, les scénaristes Michel Contat et Michel-Antoine Burnier ont beaucoup pris dans ses textes et dans les souvenirs des témoins directs de la geste sartrienne (dont ils font partie) pour restituer, de dialogues en conférences, le personnage. Quelques exemples.
A deux reprises, on voit Sartre rendre ses manuscrits à Robert Gallimard, fils de Gaston. Il le fait avec une rare gratuité, sans poids et sans souci. Sartre est ainsi : un don naturel, appuyé sur la certitude de sa valeur. Dans le numéro anniversaire des Temps Modernes de 1990, dix ans après sa mort (1), l'éditeur raconte qu'un jour, l'écrivain arrive avec un énorme paquet et dit : «Voilà, Robert, La critique de la raison dialectique, je vous l'avais promise, la voilà ! He bien, maintenant, on va prendre un verre !» Il ne demande rien : «Sartre, c'était aussi cela, il ne s'inquiétait jamais du tirage de ses livres, ni de savoir si l'on allait faire de la publicité, et à quelle date cela paraîtrait.» A toute question, il répond : «Comme vous voulez !»
«Une supériorité qui tourne à vide.» Cette générosité se retrouve dans la scène où Sartre écrit, entre 1956 et 1961, l'un de ses sept articles pour l'Express. Une fois, l'article doit être publié sur deux pages (environ 15 feuillets, les lecteurs lisaient en ce temps-là) : Sartre en é