Il y a un an jour pour jour, le mercredi 2 septembre 2009, au Salvador, pays au taux de criminalité le plus élevé du continent latino-américain, Christian Poveda se dirige vers le quartier de non-droit du gang de la M18, qui l'a convoqué pour mieux le piéger vers son tragique destin. Il est 9 heures du matin et, au téléphone, sa voix est posée, chaleureuse malgré un soupçon de tension : «Allô Christian, où vas-tu ?» «A la Campanera. J'ai rendez-vous avec quatre fous furieux.» On sait aujourd'hui qu'ils furent parmi ceux qui allaient l'assassiner quelques heures plus tard. L'enquête, toujours en cours, n'a pas encore pu déterminer les commanditaires.
Christian Poveda a été tué par ceux-là même auxquels il a consacré près de quatre ans de sa vie : les gangs du Salvador. Il attendait de rejoindre Paris pour la sortie sur nos écrans de La Vida Loca, quelques jours plus tard. Le film est devenu culte. Car Christian avait pressenti combien la violence qui gangrène la société salvadorienne échappait aux frontières géographiques de ses origines pour devenir, à l'heure de la mondialisation, plus qu'un constat : une mise en garde à l'échelle de la planète. Les atrocités des guerres civiles, qu'il avait couvertes en jeune reporter en Amérique latine dans les années 1980, lui donnaient toutes les justifications d'un permanent devoir de mémoire. Vingt-six ans plus tard, il lui a suffi d'arpenter les faubourgs de San Salvador où s'affrontent les gangs pour se convaincre d