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Éditorial

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publié le 2 novembre 2011 à 22h58

Après la destruction de leurs locaux, inviter Charlie Hebdo à s’installer à Libé, ouvrir nos colonnes, prêter des ordinateurs étaient des gestes d’élémentaire confraternité. Il n’était pas question que l’hebdomadaire satirique soit absent des kiosques la semaine prochaine. Le symbole aurait été aussi sinistre que cette image sans précédent: un journal totalement détruit par le feu, en plein Paris. A ce stade, personne ne sait qui a lancé le cocktail Molotov, et l’équipe de Charlie elle-même appelle à la retenue, à la plus grande prudence. Sage conseil. Que certains politiques, sentant venir la bonne affaire, se sont empressés de ne pas suivre, ciblant directement les musulmans de France, appelant à déchoir de leur nationalité les auteurs de l’incendie. Nous contre eux. La République et les Français contre leurs ennemis… de l’intérieur?! Une récupération nauséabonde qui se fait, toute honte bue, au nom de la liberté de la presse. On aurait aimé que celle-ci soit défendue avec la même ardeur quand l’espionnage d’un journaliste du Monde et la traque de ses sources présumées ne suscitaient, au sommet de l’Etat, qu’un haussement d’épaule.

Mais que ces réactions politiciennes et cet unanimisme opportuniste ne masquent pas l’appréhension suscitée par l’incendie de Charlie. Chez les journalistes, qui n’ont pas envie de se terrer dans des bunkers sécurisés pour simplement faire leur métier. Chez les citoyens, même les plus placides, qui sentent parfois dans l’air une électricité mauva