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Libération
TRIBUNE

Femme de personne

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par Audrey Pulvar, journaliste
publié le 6 mai 2013 à 19h16
(mis à jour le 7 mai 2013 à 16h48)

Combien de jours, combien d’heures, dans nos modernes pays riches, entre deux lamentations, hélas souvent justifiées et sur l’air de «c’était mieux avant», à propos du recul des libertés, de la fin de l’intime, de la relativité absolue, celle qui met tous événements et informations sur le même plan ? Beaucoup se plaignent de la vacuité du moment, du survol artificiel des «vrais problèmes», de la différence entre opinion publique et opinion publiée, par les générateurs officiels de bruit : journalistes, politiques, penseur(e)s de tout poil. Les mêmes pourtant, déplorant l’absurdité générale, résistent-ils toujours à l’envie de se ruer, sur le dernier ragot, le dernier «allô», la dernière vaine polémique, alimentant l’hydre qu’ils prétendent combattre ?

En une époque où rappeler qu’il y a peu s’achevait un siècle de luttes pour les idées vous range immédiatement sur l’étagère des vieux cons, on se surprend à relire les fulgurances et les colères de celles qui firent du féminisme leur cause. Histoire d’être bien sûr(e) qu’on n’a pas rêvé, qu’un jour, dans ce pays, après des siècles de lutte, la capacité de penser par elles-mêmes a bien été reconnue aux femmes. Naître femme, justement, au début des années 70. Se forger un destin par soi-même, sans compter sur un homme pour autre chose qu’enchanter le cœur, quand on prenait sur soi les efforts et sacrifices à consentir pour réussir sa vie professionnelle et affronter le quotidien. Naître femme donc, se construire, articuler une pe