Couturier attitré de Chanel, en contrat depuis vingt ans avec la marque italienne Fendi, Karl Lagerfeld a récemment cédé sa propre marque (Lagerfeld Gallery) à l'Américain Tommy Hilfiger. Celui qui, adolescent, rêvait de devenir caricaturiste analyse pour Libération l'évolution du corps des mannequins et revient sur les changements d'esthétique dans la mode.
Est-ce que la morphologie des mannequins a changé ?
Oui, depuis trois saisons, on voit arriver de vraies Martiennes. Prenez les filles de l'Est, elles ont 15 ans, mesurent au moins 1,80 m, elles ne sont pas maigres, ce ne sont pas de pauvres êtres décharnés comme on disait du temps de Kate Moss. Elles sont mignonnes, rondelettes. Elles sont faites comme des choses d'ivoire, parce qu'elles sont très blanches et d'une longueur interminable . La plus connue par exemple, Natalia Vodianova, qui a épousé un comte anglais, est déjà presque dépassée à 23 ans. Elle vendait des légumes sur le marché de Nijni-Novgorod en Russie, quand elle a été découverte : je trouve ça fantastique. Elle était débrouillarde, intelligente, vive comme une actrice.
Les «nouvelles» ont des fesses, des seins et sont moins maigres ?
Elles n'ont pas beaucoup de seins. Elles sont absolument impeccables, elles entrent dans les robes sans aucun problème. C'est difficile à expliquer, c'est une autre silhouette, une autre attitude du corps. Il ne faut pas avoir d'os trop larges; il y a des choses qu'on ne peut pas raboter... Le corps «mode» d'aujourd'hui, c'est une silhouette faite au moule, d'une étroitesse incroyable, avec des bras et des jambes interminables, un cou très