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Interview

Olivier Saillard : « Le prix fait partie de l'illusion qu'entretient la mode »

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Présentés lors de défilés toujours plus spectaculaires puis portés par des stars sous contrat publicitaire,les vêtements sont, selon Olivier Saillard, conservateur du musée de la Mode, porteurs d'une valeur médiatique.Un phénomène qui contribue à l'inflation des prix. Entretien sans tabou.
publié le 4 mars 2006 à 20h34

Qu'achète-t-on quand on achète de la mode ?

De l'image, de la marque. Moi-même, je suis encore un peu crédule. Acheter une marque reconnue, c'est plus rassurant. On se sent conforté dans un choix s'il est signé, validé. C'est très compréhensible : la plupart des gens n'arrivent pas à trouver leur bonheur dans les fripes, alors que les professionnels de la mode y sont très à l'aise. Le grand public est perdu s'il n'a pas de guide, si son choix n'est pas déjà validé en amont. On nous dit qu'il existe de nombreuses tribus ; je pense au contraire qu'il y a une «H & Misation» du monde.

Que pensez-vous du prix des vêtements ?

Qu'il est extrêmement élevé pour le Français moyen. Et même si on le réduisait de 30 %, ce serait toujours très cher. Il faudrait au moins 50 %. La réalité de la mode, elle est chez H & M et chez Etam. Moi-même, il y a des choses que je ne comprends pas : j'ai acheté un pull en solde à 9 euros, puis je me suis procuré le même modèle, plus cher, chez APC. Enfin, le même pull m'a coûté une fortune chez Costume National ; de plus, il a rétréci au deuxième lavage. Je ne comprends pas. Tout cela doit faire partie d'une illusion. Si vous interrogez des fabricants, ils vous répondent : «Ce pull, que je le fasse pour Untel ou Untel, c'est le même.» Après, les différences de prix, ce n'est pas leur problème... Il reste que c'est tellement cher par rapport à ce que c'est. Ça ne le mérite pas. Je ne saisis pas, par exemple, pourquoi Prada ou Dolce & Gabbana sont si chers.