L'espace de cinq minutes, Kappauf a été impeccable. Répondant, à peine assis: «Comment je me sens ? Prêt à me jeter par la fenêtre. Le truc, c'est que je vais devoir aller en rehab. Trop d'excès.» Théâtral, «tendance» jusqu'à l'outrance, impudique et bientôt imbuvable, c'est le scénario qu'on s'était échafaudé pour l'avoir un temps croisé dans les défilés de mode. Il était alors un gros chauve en fourrure blanche et lunettes noires qui faisait des mines, accréditant à lui seul la thèse d'un milieu (la fashion) vicié par l'excroissance égotiste et la vacuité abyssale. On apprenait qu'il était le patron de Citizen K, ce trimestriel féminin rutilant de plus de 360 pages, vendu 1 euro grâce à l'omniprésence de la pub ? Bingo. Un mag à deux balles, mais au titre mégalo, voilà qui allait comme un gant à la créature.
Las, Kappauf n'a pas tenu ses promesses. Kappauf, cet après-midi-là en tout cas, est affable, attentif et plutôt drôle. Et ce qu'on s'apprêtait à lui envoyer dans les dents, il le dit spontanément. Par exemple : «Je suis un alien, il me suffit de respirer pour énerver tout le monde.» Ou encore : «Ça n'est pas mon homosexualité qui gêne, des garçons qui aiment les garçons, il y en a des tonnes. C'est moi qui gêne, je suis "trop", d'ailleurs l'establishment de la gaytitude me le fait bien sentir.» Enfin, arme fatale, l'autodévaluation : «Je ne m'aime pas; je me trouve le dernier des cons, et moche.» Là, on est