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Libération
Critique

Une autre temporalité de la mode

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Papier blanc, tissus, rubans… la confection de la robe est une leçon de gestes.
Tilda Swinton. (Photo Ruediger Glatz)
publié le 21 novembre 2013 à 18h06

Dans l'amphithéâtre des Beaux-Arts, elle se tient droite sur un socle. Sur elle se déroule la délicate opération, quasi chirurgicale, de la confection d'une robe de haute couture. The Eternity Dress («la robe éternelle») est «une performance qui repose sur la création d'une robe, une seule», mettant en scène un atelier dont le maître d'œuvre, le «premier» dirait-on dans le jargon modeux, est Olivier Saillard, conservateur du Musée de la mode de la ville de Paris, et le mannequin Tilda Swinton, actrice écossaise. Ils reprennent une idée ébauchée l'an dernier (lire ci-dessous) qu'ils renouvellent, avec ces trois quarts d'heure emplis d'une érudition qui, si elle ne déconcerte pas, laisse imaginer une autre temporalité que l'immédiateté que l'on associe souvent à la mode, celle du défilé, du produit fini et étiqueté.

Sociolecte. The Eternity Dress retourne à la base, aux étapes de la confection, connues des seuls initiés, qui s'animent dans des scènes drôles ou concentrées.D'abord, les mesures. Tilda Swinton, en combinaison chair, les énonce en français, en reprenant ce vocabulaire surréel de précision : «Hanche à 7 centimètres, à 25 centimètres», «écart poitrine», «fourche»… Saillard s'en occupe, un mètre ruban à la main. Le lieu n'est pas anodin : devant ce tableau noir de l'amphi, c'est un cours de mode qui se déroule. Une leçon de gestes, de mots, sur ce sociolecte