Irrésistiblement, la main s’allonge, attirée comme un aimant. Ah ! Effleurer du bout du doigt cette traîne cousue de milliers de plumes délicates, ce cône absurde posé sur son socle ou ces talons tordus qui vous font mal au dos rien qu’en les regardant. L’exposition en hommage à la Britannique Isabella Blow, qui s’ouvre à Londres dans les murs de la magnifique Somerset House, a ceci de magique qu’elle n’est en rien solennelle. Intitulée «Isabella Blow : Fashion Galore !» (littéralement «la mode à gogo !»), mi-cathédrale, mi-défilé de mode, elle est joyeuse, extravagante, voire un peu dingue parfois. Comme son inspiratrice. Isabella Blow était tout cela, et tragique aussi.
Icône de la mode britannique, ni designer, ni muse, ni vraiment pygmalion, elle fut pourtant une figure clé de la mode des trente dernières années, jusqu’à son suicide en 2007. Un regard, perçant et innovant, capable de déceler le génie dans une robe trempée dans la boue (Hussein Chalayan), dans un chapeau sculpté en château fort (Philip Treacy) ou dans une robe du soir de dentelle noire, dont la cape relevée couvre une paire de bois de cerf posés sur le sommet de la tête (Alexander McQueen). Ce regard unique lui a permis d’accompagner, d’encourager et de développer ce qu’on a appelé le mouvement Cool Britannia, né au milieu des années 90. Lié aussi à l’élection du New Labour de Tony Blair, il a touché tous les secteurs artistiques. Comme si, soudain, après des années de conservatisme, de difficultés économi