L'invitation disait : «To the archives, no longer relevant» (en rapport aux archives, mais cela n'a plus d'importance). L'exergue pouvait ressembler à un sujet de dissertation. Les silhouettes de Raf Simons ont l'âge de passer les épreuves. Sortant du cours de chimie, marchant sur de longues estrades qui dominent les invités restés debout, les garçons écoutent Child in Time de Deep Purple et portent des blouses de laborantin couvertes de gribouillages : tête de mort, smiley, signe oméga, et un visage qui pourrait être celui du prof ou Raf Simons lui-même.
Le créateur belge (par ailleurs en charge de la haute couture chez Dior) mélange filles et garçons, leur impose la raie au milieu et la gomina. Dans ce grand entrepôt d’Ivry-sur-Seine impossible à chauffer, il revient à ces jeunes années où tous les tests, tous les mélanges sont possibles. Tweed et pied-de-poule, cols roulés sous de longs gilets débardeurs sans manches, couleurs vives - bleu, vert, jaune - et teintes ultra classiques - camel, marron, orange, crème. Les manteaux sombres affichent de grossières coutures, les trenchs sont coupés aux épaules, une veste vermillon en vinyle surgit telle une étincelle. Les garçons et les filles vont et viennent par groupes de trois ou quatre, comme au lycée, où on finit toujours par trouver sa paire ou sa bande.
Photo : Emma Picq