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Libération
Critique

Dior, interstellaire

Haute couture printemps-été 2015. Les défilés vus par la photographe Emma Picq.
Défilé Dior au musée Rodin. (Photo Emma Picq)
publié le 26 janvier 2015 à 19h36

Eblouissement chez Christian Dior. Au musée Rodin, l'intérieur d'une gigantesque tente se tapisse de miroirs et un échafaudage de poutres de métal forme une structure où prennent place les invités. L'installation a quelque chose d'une déclaration : la mode est un chantier permanent nourri de reflets et de fantasmes. C'est une ambition radicale que déploie le directeur artistique Raf Simons, utilisant tous les potentiels de l'appareillage Dior. Dans la note du défilé, le Belge écrit : «Je voulais une impression de surcharge sensorielle […] un endroit où l'on ne sait ni où l'on se trouve, ni à quelle époque.» Sur des airs de Bowie, arrivent des filles dans des robes en coton écru, ajourées et brodées de paillettes, sur lesquelles sont jetés des manteaux de plastique transparent. Puis, collant le corps des filles, des combinaisons aux imprimés 70 multicolores, des cuissardes en vinyle noir. Raf Simons a posé son curseur vers les fantasmes futuristes du passé, vers l'époque où Barbarella et autres créatures habillées par Courrèges peuplaient l'imaginaire du progrès. Cet univers, il l'adapte à l'héritage du New Look. Les robes évasées, dans la tradition du fameux modèle «bar» inventé par Christian Dior, se parent de couleurs pop, comme l'orange, ou plus fanées (bleu pâle). Partout, le travail obsessionnel des ateliers est célébré, des broderies scintillantes comme des bijoux aux merveilleux ensembles de soie plissée, en accordéon, de couleurs vives. Raf Simons ravive un genre, la haute couture, que l'on dit fatigué, rappelle qu'elle est l'unique laboratoire d'un style élitiste, mais qui se distillera ensuite partout. Et, au passage, propose un spectacle quasi sidérant.